Présentation
Pitch
Chaque jour, en rentrant chez elle, Zélie découvre que ses affaires ont été déplacées sans explication. Persuadée d’être victime d’une intrusion, elle alerte la police et son ami Maël, mais personne ne la croit. Peu à peu, elle sombre dans la paranoïa et s’isole, hantée par ces événements étranges. Poussée à bout, elle tente de reprendre une vie normale en rejoignant Maël à une soirée. Mais cette tentative tourne au cauchemar…
Crédits
Réalisatrice : Isidore Louna
Co-réalisatrice : Terminn Alice
Scénario : Isidore Louna, Terminn Alice, Galonnier Anna, Moskaliuk Polina, Kuntz Clara-Marie
Caméra : Isidore Louna
Lumière : Galonnier Anna, Terminn Alice
Monteuse et mixeuse : Terminn Alice
Perchiste Son : Moskaliuk Polina
Scripte : Kuntz Clara-Marie
Régisseuse : Galonnier Anna
Costumes : Isidore Louna, Terminn Alice, Galonnier Anna, Moskaliuk Polina, Kuntz Clara-Marie
Effets Spéciaux : Viovi Hugo
Maquilleuse : Moskaliuk Polina
Dates et lieux de tournage
4 avril : 8h-10h : lecture du scénario
21 avril : 8h-12h / 14h-18h : séquence 1, 2, 6 et 12 ; appartement
28 avril : 14h-18h : séquence 8 ; école de journalisme Médiaschool
1 mai : 14h-00h : séquence 5, 7, 8, 9, 11 et 13 ; appartement
10 mai : 14h-22h : séquence 4 et 10 ; appartement
11 mai : 6h-14h : séquence 3, 15 et 16 ; appartement
21 mai : 16h-2h ; séquence 14 ; bar Le Spot
Stade actuel d'avancement
Terminé.
Synopsis
Au 5ème étage d’un petit immeuble de banlieue, Zélie est tourmentée. Tous les jours depuis une semaine, après ses cours à la fac de médecine, elle rentre chez elle et remarque que tout a été déplacé. Perturbée par ce qu’elle croit être une intrusion quotidienne, elle alerte les forces de l’ordre ainsi que Maël, son meilleur ami d’enfance, qui semblent ne rien voir et ne rien entendre. Zélie croit devenir folle. Jour après jour, les événements prennent une tournure dramatique malgré l’intervention policière qui s’avère infructueuse. Convaincue d’être seule contre tous, Zélie s’isole peu à peu de son entourage, à l’exception de Maël. Il tente de la rassurer à de nombreuses reprises en l’appelant lorsqu’elle est persuadée qu’on l’observe. Les semaines se déroulent et, au fur et à mesure, ces événements étranges se multiplient poussant la jeune femme dans une torture psychologique mêlant doute et attente. Incapable de démeler le vrai du faux, elle s’enfonce dans une bulle de paranoïa. Dans un dernier geste d’espoir, Zélie décide de sortir de sa zone de confort et de rejoindre Maël à une soirée. Malgré cette tentative de reprise de contact avec le monde, les choses ne se déroulent pas comme prévu.
Note d'intention
> La place des femmes
Étant une équipe de cinq femmes, il était évident pour nous que notre personnage principal en soit une. Nous avons voulu donner à Zélie des problématiques que rencontrent les femmes dans la société patriarcale. Sans pour autant viser une dimension politique, nous voulons le traduire de façon subtile et diffuse.
Nous avons souhaité transposer et incarner les obstacles auxquels les femmes font face au quotidien (comme la remise en question de leurs témoignages) avec les figures masculines des policiers et de Maël qui ne cessent de contredire Zélie. La confrontation entre les genres est également traduite par des splits screens au sein de l’image, comme par exemple la séparation par l'encadrement de la porte dans la séquence qui oppose les policiers à Zélie (séquence 1). Le spectateur sera ainsi amené à penser qu’elle est dramatique, paranoïaque et même hystérique. Des caractéristiques qui peuvent être attribuées aux autres figures féminines : Madame Schmitt semble décalée de la réalité, survoltée par ses émotions ; aussi à travers la mère de Zélie, celle-ci n’ayant même pas conscience du mauvais traitement qu’a pu subir Zélie plus jeune. Elle est sous l’emprise d’un homme, mais surtout conditionnée par la société à accepter cette posture de soumission qui est imposée aux femmes.
La minimisation des émotions et de la perception des événements que subit notre personnage féminin la pousse dans ses retranchements. Ce sont ces réactions qui la mènent à la folie dès son plus jeune âge. Elle subit le machisme et la domination d’un homme, son propre père, qui manipule sa pensée et son corps. Cette oppression crée en elle un besoin irrépressible de se protéger d’eux, la poussant au meurtre. Le fait que cette dernière s’en prend en particulier aux enfants peut-être compris comme l’envie de leur éviter de grandir pour devenir des figures stéréotypées de la société, comme pour leur éviter de traverser un long chemin d’obstacles similaire à celui qu’elle a pu vivre.
Le rôle de meurtrier donné à Zélie est là pour provoquer un choc dans l’esprit du spectateur. Souvent associée à une figure de douceur, la femme est inhabituelle dans cette posture. Ce que nous souhaitons, c’est la sauver des carcans de la société, quitte à répondre à la violence des hommes par la violence.
> Le choix de la colorimétrie
Nous nous sommes mises d’emblée d’accord sur un parti pris de mise en scène : l’usage de la couleur. Ce choix s’est imposé très rapidement au regard de nos sensibilités croisées et de nos goûts communs. Le traitement de la couleur au cinéma nous est apparu comme un point capital, hautement symbolique et infiniment esthétique. En ce sens, la trilogie de Krzysztof Kieślowski, Trois couleurs : Bleu (1993), Blanc (1994), Rouge (1994) ainsi que le film La Double vie de Véronique (1991), se sont imposés comme des inspirations incontournables quant à l’usage narratif et figuratif de la colorimétrie et l’importance de disséminer des couleurs dans le décor. La question de la saturation a été portée à notre attention grâce aux films du giallo italien, en particulier Suspiria (1977) de Dario Argento qui nous sert activement de référence dans l’élaboration d’une esthétique visuelle singulière.
Par le travail de la lumière (à l’aide de lumières LED), de la caméra, de l’atmosphère, du décor, des costumes et de la post-production (grâce à l’étalonnage), l’idée est de convoquer tout au long du court-métrage des couleurs différentes mais dont la présence serait immédiatement perceptible. Ces couleurs incarneraient ainsi les points de vue variés et changeants du personnage de Zélie en proie à un trouble psychologique qui la tourmente. Nous avons tenu à représenter une jeune femme en marge de la société, isolée et incomprise. Le contraste entre couleurs chaudes et couleurs froides serait ainsi le reflet de cette dualité entre société et individu, entre esprit sain et esprit dit « malade ». L’alternance de la palette chromatique et la gradation de l’intensité des couleurs permettrait surtout de mettre en évidence la dégradation de l’état mental du protagoniste principal.
Ici, la couleur est autant un effet de mise en scène qu’une intention narrative. Car elle contribue à exprimer l’intériorité du personnage, ses intentions et ses perceptions, sans recourir à des dialogues ou actions. Davantage qu’une appréciation pour la saturation des couleurs, il est question de donner à voir un univers mental par un univers visuel assumé. En prenant garde d’éviter les écueils de l’exagération et de la sur-stimulation, les couleurs ne devront donc pas s’imposer au détriment des autres partis pris de mises en scène : les mouvements de caméra, l’échelle de plans, les indications de jeux, le montage, les effets sonores… Elles doivent avant tout être appréhendées en complément et en soutien du récit.
Les conflits internes du personnage trouvent ainsi leur voix dans des teintes jaunes, vertes, violettes et rouges. Ce rouge justement si important à notre court-métrage en a directement inspiré le titre : Carmin. Le carmin est un rouge vif éclatant qui rappelle inévitablement le rouge du sang. Le genre de l’horreur est propice à l’emploi d’une telle couleur, il regorge d’échos cinématographiques et de références visuelles. De la sorte, notre court-métrage se pense comme une poétique des nuances de rouge. Il s’agit d’explorer toutes les humeurs, peurs et personnalités de Zélie : le rouge à l’écran signalant la présence de l’alter égo meurtrier.
> Un film psychologique
> Un personnage paranoïaque...
Notre court-métrage dépasse l’horreur classique pour explorer également des thématiques psychologiques liées aux traumatismes d’enfance entraînant des troubles mentaux. En l’occurrence, le personnage de Zélie est atteint de paranoïa et d’un dédoublement de la personnalité, que le spectateur ne réalise qu’à la fin du film.
La représentation de la paranoïa vient s’ancrer dans la matérialité même du film, à travers non seulement le jeu d’acteurs mais aussi les choix plastiques, en particulier ceux liés à la colorimétrie. En effet, la paranoïa, ce trouble psychiatrique caractérisé par une méfiance extrême envers les autres et une tendance à interpréter leurs actions comme malveillantes, est traduite par les délires grandissants de notre personnage, qui enchaîne crises d’angoisse, colères et appels à l’aide en vain. L’aspect fiévreux de ce genre de trouble est retranscrit par des choix de couleurs pourpres, rouges et orangées lors des séquences plus hallucinatoires du quotidien de Zélie, accentuant le côté délirant croissant des événements. La colorimétrie et les plans en caméra subjective visent ainsi à nous faire percevoir le monde sous le prisme de Zélie, sous son regard. Il s’agit d’une immersion esthétique dans le mental de notre personnage principal.
Le choix d’avoir un huis-clos quasi-intégral émane également d’une volonté de représenter les angoisses paranoïaques de notre personnage. L’enfermement dans un espace normalement intime et sécuritaire – celui de son propre appartement – devient alors anxiogène et inquiétant. Persuadée qu’un intrus pénètre régulièrement chez elle, Zélie ne se sent pas à l’aise dans son propre lieu de vie, qui devient le théâtre de ses délires, ses crises d’angoisse et ses hallucinations. L’absence de lieu extérieur – hormis dans la séquence de la fête – enferme le spectateur avec le personnage, lui faisant goûter au sentiment d’étouffement et de peur que subit Zélie tout au long de la fiction.
> ...doublé d’un alter agressif
Carmin explore donc la psyché morcelée de Zélie, jeune femme en apparence ordinaire, mais profondément marquée par une enfance traumatisante. Face à un père violent et omniprésent, elle a construit un mécanisme de survie extrême : la dissociation. De cette fracture mentale est né un Alter ego, une personnalité secondaire, protectrice mais incontrôlable — l’écho d’un enfant intérieur furieux, enragé, prêt à bondir à la moindre intrusion. Ce trouble dissociatif de l'identité ne se manifeste pas seulement dans le jeu actoral, mais à travers toute la mise en scène, pensée comme une plongée sensorielle dans l’instabilité mentale de l’héroïne.
L’univers visuel repose sur une utilisation expressive de la lumière et de la colorimétrie : le rouge carmin, couleur éponyme, signale la présence de l’Alter ; il est brut, charnel, il imprègne l’espace comme une tache indélébile. En opposition, le vert, plus glacé, accompagne Zélie « consciente », plus vulnérable, enfermée dans une réalité qu’elle ne maîtrise plus. Ces ambiances lumineuses servent de repères émotionnels pour le spectateur, qui évolue avec Zélie à travers cette perte de repères sensoriels et identitaires.
De plus, le son dans notre film devient une mémoire vivante : des flashbacks auditifs (cris du père, pleurs de l’enfant qu’était Zélie) surgissent sans prévenir, envahissant l’espace sonore tels des fantômes. Ils agissent comme des déclencheurs sensoriels qui précipitent le surgissement de l’Alter. Ce dédoublement psychique se traduit aussi physiquement : le corps de Zélie change. Sa cicatrice au bras, symbole de douleur et de refoulement, évolue visuellement tout au long du film. D'abord fine, presque oubliée, elle s'élargit, s'enflamme, saigne à mesure que l'Alter prend le dessus.
Ce qui rend Carmin singulier, c’est aussi le traitement narratif et visuel du dédoublement. L’Alter reste majoritairement hors-champ, absent du cadre mais omniprésent dans l'atmosphère. Le reste du temps, le récit épouse le point de vue de Zélie et le spectateur découvre, comme elle, des indices troublants : des objets déplacés, des gouttes de sang partout, un frigo qui s’ouvre seul… Les actions de l’Alter se déroulent hors-champ, laissant leurs traces comme des énigmes. Le spectateur n’est plus un simple observateur : il devient actif, complice involontaire, cherchant à comprendre ce qui est vrai, ce qui est illusion, ce qui appartient à Zélie — ou à l’autre.
Carmin est moins un récit sur la folie qu’un labyrinthe émotionnel, une quête de soi à travers les ruines de la mémoire. Le film interroge la manière dont un esprit se protège, dont il crée un double pour résister… jusqu’à ce que ce double ne demande à exister à part entière.
> Le choix de l’horreur
L’horreur est un genre qui transcende les émotions et interroge nos peurs les plus intimes. Pour nous, c’est plus qu’une simple exposition de l’effrayant, mais une exploration de l’inconnu, du mystère et de la frontière entre la réalité et l’imaginaire. L’horreur est l’un des seuls genres capables de déclencher des réactions physiques immédiates : frissons, sursauts, accélération du rythme cardiaque… tout en plongeant le spectateur dans un état de vulnérabilité sensorielle totale. C’est un genre primitif, presque instinctif, qui touche directement à notre inconscient. Il agit comme un miroir déformant de nos angoisses les plus profondes : la mort, la solitude, la folie, le vide, la perte de contrôle.
Parmi tous les sous-genres de l’horreur, l’horreur psychologique se distingue par sa capacité à provoquer une peur insidieuse, lente et durable. Là où l’horreur pure peut choquer, l’horreur psychologique infiltre, creuse et trouble. Elle joue avec l’esprit du spectateur, brouille les repères, et le pousse à remettre en question ce qu’il voit et comprend. Cette approche crée une immersion bien plus intense car elle sollicite l’imagination et la sensibilité intérieure. C’est une peur qui ne disparaît pas avec le générique de fin, mais qui persiste et laisse une trace.
Dès le début, notre objectif premier était de jouer sur le doute en plaçant le spectateur dans un état constant d’incertitude. Dans ce projet, l’horreur ne repose pas que sur ce qui est montré, mais sur ce qui est suggéré. Nous voulons faire ressentir la menace sans la dévoiler pleinement. Chaque image, chaque son, chaque ombre a pour but de maintenir une ambiguïté qui stimule l’imagination du spectateur, en augmentant ses craintes. L’horreur devient alors une expérience active dans laquelle le spectateur ne se contente pas seulement de regarder, mais d’interpréter, anticiper et ressentir. Nous jouons sur les non-dits et les zones d’ombre. Ce qui nous permet de créer une tension unique et immersive, où la confusion devient plus intrigante et effrayante que l’explicite lui-même. Le suspense est au cœur de cette œuvre et atteint son paroxysme avec le plot twist final. Ce véritable pivot narratif renverse les attentes et offre une perspective inédite aux spectateurs.
Pour nourrir cette démarche, nous nous sommes largement inspirées de plusieurs œuvres majeures du genre. Suspiria (1977) de Dario Argento nous a guidées dans l’utilisation expressive de la lumière, de la couleur et du son, dans la perspective de créer une atmosphère sensorielle dérangeante et presque hypnotique. Longlegs (2024) d’Oz Perkins, quant à lui, a profondément influencé notre manière d’aborder la narration elliptique et l’ambiguïté psychologique. L’effet vertigo sera l’un des effets principaux de notre réalisation afin de façonner une angoisse et un malaise chez le spectateur et d’intensifier les moments de stress. Pour créer cette angoisse, nous avons également puisé dans d’autres références marquantes, passant de Hereditary (2018) d’Ari Aster à The Shining (1980) de Stanley Kubrick, ainsi que Split (2016) de M. Night Shyamalan ou encore L’Antre de la folie (1994) de John Carpenter — des films qui, chacun à leur manière, jouent sur la frontière entre le réel et le fantasme, entre la peur intérieure et l’horreur visuelle.
Ce projet est donc une invitation à entrer dans un univers où la peur se conjugue au plaisir du mystère et où chaque détail devient majeur pour vivre une expérience immersive et marquante.
Remerciements
Charlotte Zaborny
Nour Lafond
Sonja Wirwohl
Stanislas Horand
Tristan Trajan
Michèle Lacarelle-Isidore
Herick Isidore
Cécile Dubout
Angeline Kossmann
Hugo Viovi
Nathalie Barthel
Matthieu Wine
Candice Demay
Martin Clidi
École “Mediaschool”
Boucherie “Bien Élevé”
Boucherie “L’art de la viande”
Bar “Le Spot”
Mani Soltany du Bar “Le Spot”